Chape de plomb sur le marché porcin européen

17 novembre 2022 - Yanne Boloh

Porc Armor a organisé un voyage pour dix éleveurs et deux techniciens lors du récent salon EuroTier de Hanovre (Allemagne). Une bonne occasion de se renseigner sur la situation des éleveurs porcins hors de France en sus des innovations à explorer.

Le groupe d'éleveurs Porc Armor accueillis sur le stand Hypor ©YanneBoloh

À l’occasion du salon EuroTier, le plus grand dans l’UE consacré aux productions animales, si l’innovation était bien présente, les incertitudes aussi. Durant sa visite, un groupe de 10 éleveurs du groupement Porc Armor venu avec deux techniciens de toute la zone du groupement (Normandie, Bretagne, Pays-de-la-Loire), a fait aussi le point sur la situation actuelle et prévue sur les principaux marchés européens. « Peter Heinrichs d’Hypor estime que le cheptel porcin allemand a perdu 25 % en deux ans et demi, passant de 1,3 millions de truies à 1 million », rapporte ainsi Christophe Guivarch, technicien bâtiment Porc Armor.

Durcissement de la réglementation bien-être en Allemagne

Les abattages allemands sont déjà passés en 6 ans de 1 million de porc hebdomadaire à 700 000 actuellement. Cette contraction résulte de facteurs déjà bien connus comme la pyramide des âges avec un renouvellement très partiel des chefs d’exploitation, mais aussi du durcissement de la réglementation comme les cases liberté en maternité d’ici 2030 et la fin de la contention des truies en verraterie d’ici 2028. « Ce ne sont pas des directives européennes, les conditions qui s’imposent aux éleveurs allemands sont plus dures que chez nous puisqu’en France, le dernier texte sur la non contention des truies gestantes, qui traduit le cadre européen de 2001, remonte à 2003 », rappelle Christophe Guivarch.

Selon ses informations, un éleveur germanique qui choisirait d’appliquer le cadre de la loi par anticipation en construisant une maternité neuve pour 180 truies devrait investir 1,5 M € mais bénéficierait d’une aide de 500 000 €.

Une chute chez tous les gros pays producteurs

La politique agricole est également très encadrée aux Pays-Bas avec un plan de réduction de 30 % de l’impact carbone des élevages d’ici 2030. Le cheptel de truies devrait donc s’y contracter aussi, probablement de 20 %, passant de 750 000 à 600 000 truies avant cette échéance.

Le Danemark, traditionnellement la locomotive de naissage de l’UE, ralentit après avoir perdu 10 % de ses truies en deux ans pour atteindre 900 000 actuellement, principalement sous l’effet de l’érosion naturelle des éleveurs, le contexte économique n’incitant pas les jeunes à s’installer.

La pente est encore plus forte en Belgique qui a déjà perdu plus de 30 % (voire 35 %), puisqu’il ne lui reste désormais qu’aux environs de 300 000 truies. Enfin, l’Espagne fait face à des défis de deux ordres : d’une part l’augmentation très forte des cours des céréales alors qu’elle est très dépendante de ses importations, et d’autre part l’aspect sanitaire avec la rosalia, un virus de la famille SRDP qui frappe fort dans les maternités ibériques. Sur les trois derniers mois, le volume d’abattage s’est ainsi fortement contracté même si sa croissance exponentielle ces dix dernières années n’est pas remise en cause par cette conjoncture.

« En synthèse, d’ici 5 à 7 ans, l’UE devrait perdre 25 millions de porcs c’est-à-dire l’équivalent de la production française », résume Christophe Guivarch.

De notre envoyée spéciale à Hanovre, Allemagne.
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