Elevages et abattoirs : des dynamiques bien différentes entre les régions

1 août 2019 - Bérengère Lécuyer, économiste du secteur abattage-transformation à l’Ifip

En s’appuyant sur les données de BDPorc, l’Ifip a étudié la localisation et la dynamique des filières porcines en France. Résultats : entre concentration et déficit, les différentes régions étudiées connaissent des situations bien contrastées.

La production de porcs charcutiers a atteint 22,7 millions de têtes en France en 2017 selon BDPorc, soit 300 000 têtes de plus que les abattages. La distance moyenne par la route entre les abattoirs et les élevages auprès desquels ils s’approvisionnent a augmenté de 5 km depuis 2014 pour atteindre 120 km en 2017.
Trois grandes régions peuvent être distinguées :
Le Grand Ouest (Bretagne, Pays de la Loire, Basse-Normandie et Poitou-Charentes) concentre les trois quarts du secteur porcin français.
Dans le Nord (Hauts-de-France, Grand Est et Haute-Normandie) l’élevage reste dynamique malgré un déficit de capacités d’abattage.
Le Sud souffre au contraire d’un manque d’élevages. Pour la filière porcine française, les enjeux sont donc très différents d’un territoire à l’autre.

Concentration à l’Ouest

La production de porcs charcutiers des élevages de l’Ouest a diminué de 347 000 têtes entre 2014 et 2017 dont plus de la moitié pour le seul Finistère. Cette baisse plus marquée dans ce département semble être en partie structurelle. Les sites d’élevage dont l’activité a significativement baissé sont plus nombreux que ceux dont l’activité a significativement augmenté. La baisse de la première catégorie n’est pas compensée par la deuxième, le déficit s’élève à 115 000 têtes. Les élevages de la pointe bretonne ont subi la fermeture du site d’abattage de Lampaul-Guimiliau en 2013. Ils sont donc désormais plus éloignés des abattoirs que leurs homologues bretons : 126 km en moyenne en 2017 contre 60 à 80 km pour les trois autres départements.
En Basse-Normandie, le déclin de l’abattoir AIM depuis 2015 (finalement fermé en 2018) ne s’est pas traduit par une baisse d’activité des élevages. La production de porcs charcutiers a augmenté de 1,7% entre 2014 et 2017 alors que la tendance était à la baisse pour les autres régions de la zone.

Déficit d’abattoirs au Nord

Dans le nord de la France, 1,9 million de porcs charcutiers ont été produits en 2017 contre 900 000 abattus. Environ un tiers du surplus est exporté vif vers l’étranger, le reste est abattu dans d’autres régions. Les élevages nordiques sont dans l’ensemble plus éloignés des abattoirs avec une distance moyenne de 189 km en 2017, excepté les porcs abattus à l’étranger. L’Alsace, le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie bénéficient cependant des abattoirs de taille intermédiaire (100 à 500 000 porcs par an) de Saint-Pol (62) et d’Holtzeim (67). Cet éloignement n’a pas empêché la production d’augmenter de 121 000 têtes en quatre ans, soit +2,3% par an en moyenne. Les coûts de transport moyens des porcs charcutiers jusqu’aux abattoirs sont plus élevés pour les élevages du Nord, mais les écarts restent mesurés. En moyenne, ils étaient de 4,3 €/tête en 2017 (soit moins de 5 cts/kg carcasse) pour le nord contre 3 €/tête à l’échelle de la France (soit un peu plus de 2 ct/kg carcasse).

Déficit d’élevages au Sud

À l’inverse du Nord, plus de 20 % des 4 millions de porcs abattus chaque année dans le Sud sont élevés dans les régions du Nord et de l’Ouest. Le déficit s’est aggravé de 159 000 têtes depuis 2014 pour atteindre 943 000 têtes en 2017. Un quart des porcs charcutiers abattus dans le Sud provenait d’élevages situés à plus de 280 km de l’abattoir.

Perspectives : Pour les pouvoirs publics et les organisations professionnelles, ces analyses peuvent servir de support de réflexion sur la dynamique des filières régionales avec des problématiques très différentes d’un territoire à l’autre et dans un contexte de demande sociétale pour une offre de produits agricoles de proximité.
Les données BDPorc et les méthodes d’analyse de données et de cartographie développées pourraient aussi être mobilisées dans le cadre de projets très concrets de développement d’élevages, de filières, et/ou d’implantation, de rénovation d’outils d’abattage de proximité.

A noter :
Les données BDPorc sur les mouvements de porcins ont été mobilisées pour analyser les dynamiques de production et d’abattage de porcs charcutiers, leur impact réciproque et l’éloignement entre élevages et abattoirs sur le territoire français. L’étude concerne les porcs charcutiers en France métropolitaine (hors Corse et Outre-Mer) de 2014 à 2017. Etude ayant bénéficiée du financement de Franceagrimer.

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