La grande distribution s’engage auprès de la filière porcine française
Le Salon de l’Agriculture qui ferme ses portes a été l’occasion pour la grande distribution de montrer son engagement auprès de la filière porcine française.
Auchan France a été le premier à ouvrir le bal le 1er mars en signant avec le Groupe Aoste un contrat commercial annuel formalisant ses engagements de soutien à la filière agricole française. « Ce contrat repose sur la mise en place d’un accord tarifaire en 2 volets comprenant :- les échanges commerciaux entre le Groupe Aoste et Auchan ; - un processus d’indexation des prix en fonction de l’évolution du prix de la matière première porc. » L’indexation prend pour référentiel le cours officiel du marché du porc breton. Celle-ci est alignée sur celle déjà mise en place avec les abattoirs. En alignant ainsi les indexations, le Groupe Aoste engage avec lui l’aval pour soutenir l’amont agricole.
Cette démarche lancée en avril 2021 a été partagée avec les différents acteurs de la filière : clients distributeurs, FICT, ANIA, ILEC, FNSEA, FNP, Ministère de l’agriculture, etc. afin de présenter un modèle simple et clair pour les négociations commerciales 2022.
Lidl toujours en pointe
L’enseigne Lidl a ensuite pris le relai en annonçant une série d’accords commerciaux. Le premier est un contrat tripartite, engageant pour la première fois le distributeur avec le groupe régional de producteurs de porcs de Terrena Porveo et l’abatteur Elivia SAS : « Ce nouvel accord concerne une gamme de boucherie de porc conventionnel. Les produits seront disponibles dès le mois de mai dans les 100 supermarchés Lidl des Pays de la Loire. »
En région Ouest, Lidl a renouvelé pour la 7e année consécutive, son contrat avec les 150 éleveurs Opale de porc Label Rouge origine France. « Cet accord représente un volume de 500 animaux par semaine, soit plus de 26 000 porcs par an pour l’approvisionnement de 700 supermarchés Lidl de la moitié Ouest de la France. » L’enseigne annonce au passage une nouveauté produit pour l’été 2022 : un jambon cuit supérieur aux herbes Label Rouge.
Sur la région Nord, c’est avec la centaine d’éleveurs du groupement des producteurs de porcs des Monts de Flandre et les industriels salaisonniers Tradelio et De Keyser que Lidl renouvelle son contrat tripartite. Ce contrat en est à sa 7e année, mais pour la première fois, le groupe Bigard assurera l’abattage et la transformation ce qui permet à l’enseigne de communiquer sur « une filière 100% origine France ». Cet accord concerne une vingtaine de références de produits, en boucherie et charcuterie, livrées dans 150 supermarchés Lidl du Nord de la France.
Enfin, pour la 5e année consécutive, Lidl, l’entreprise de transformation Tradival et les 60 éleveurs porcins du groupement Cirhyo ont renouvelé leur contrat tripartite pour du porc Label Rouge français. Cet accord représente un volume de 400 animaux par semaine.
Lidl conclut : « La reconduction de ces signatures de contrat tripartite permet aux producteurs d’obtenir une rémunération plus juste et de proposer aux clients de consommer des produits locaux et de qualité. »
Herta réserve 2,5 millions d’euros d'aide pour ses éleveurs sous contrat en 2022
De son côté, l’entreprise Herta s’est réjoui d’avoir reçu la visite sur son stand, le 28 février, de Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation et Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, chargée de l’Industrie, tous deux accompagnés de Jean-Philippe André, président de l’ANIA. « Cette visite vient saluer les mesures de soutien apportées par l’entreprise à la filière porcine française pour l’aider à traverser une conjoncture économique particulièrement difficile », a commenté Marc Auclair, président directeur-général Herta Foods.
Alors que la France constitue déja son premier bassin d’approvisionnement, Herta s’est engagée, dès janvier 2022, à augmenter de 4 500 t additionnelles, ses achats de viandes françaises. Cette augmentation projette le plan d’achats d’Herta à 56 % de viande française sur l’année 2022. « Cette décision s’inscrit dans une stratégie d’achats qui repose sur trois obligations majeures : la disponibilité et la qualité de matières premières bien précises et la prise en compte des risques de contingence liés aux potentielles menaces épizootiques dans les bassins de production. Cette logique d’achats vise à assurer une continuité de service aux clients distributeurs d’Herta et doit répondre aux besoins quotidiens des consommateurs français en produits frais. »
Herta rappelle qu’elle a été la première entreprise de charcuterie-traiteur à contractualiser avec la filière porcine tricolore. « La création de la Filière Préférence Herta, depuis 2013, assure à plusieurs centaines d’éleveurs français référencés une garantie de débouchés chaque année », estime le pdg. Il relève par ailleurs : « les mécanismes de contrats assurantiels d’Herta ont permis le versement de près de 5 millions d’euros, ces deux dernières années, en aides directes aux éleveurs sous contrat. Herta prévoit la poursuite de ces aides à hauteur de 2,5 millions d’euros pour 2022. »
Pour les OP, le compte n’y est pas
Mais pour les associations d’organisation de producteurs de bassins de productions du Grand Ouest le compte n’y est pas : « Alors que les décideurs publics s’enthousiasment du succès des dispositifs d’EGAlim 1 et 2, l’équilibre dans les relations commerciales du secteur agricole et alimentaire est encore loin d’être trouvé. » La hausse de 3 à 4% du prix des denrées alimentaires annoncée, en partie expliquée par le contexte inflationniste, n’est pas le témoin d’une redistribution équilibrée. Malgré certaines avancées, les Associations d’Organisation de Producteurs de bassins de productions du Grand Ouest déplorent une construction du prix ne répondant toujours pas à la logique de la marche en avant, voulu par le législateur avec EGAlim 1.
« Tant que subsistera un principe de ruissellement dans la construction du prix, en partant de la grande distribution pour aller vers le producteur, le rapport de force dans les négociations commerciales ne pourra pas être rééquilibré. Il faut inverser la logique ! Et cela passe par la structuration en Organisation de Producteurs », insiste Fabrice Guérin, président de Poplait, signataire avec le Cerafel et AOP Grand Porc Ouest d’une réaction par voie de communiqué de presse.
« Le défi du renouvellement générationnel est majeur. Si demain les exploitations ne sont pas reprises car les contraintes trop nombreuses, c’est la filière entière qui disparaît. Il y a une urgence à réagir pour garantir notre résilience agricole ! En structurant les filières au sein d’Organisations de Producteurs nous redonnons le poids suffisant aux producteurs pour vivre dignement et poursuivre leur mission : nourrir les citoyens», soulignent Jean-Luc Chéreau, président de l’AOP Porc et Marc Kerangueven, président de Cerafel.
Les trois structures se désolent de ne pas être au cœur des réflexions alimentaires alors qu’elles se considèrent comme « l’instrument efficace pour garantir la solidité de la production agricole française et européenne tout en offrant aux consommateurs une alimentation de qualité et responsable ».