« Vers un new deal pour l’agriculture »

16 novembre 2023 - Anne-Solveig ASCHEHOUG

Ancien éleveur de vaches laitières, Hervé Pillaud est un « Ageekulteur ». Il est membre du Conseil national du numérique, conférencier et auteur de plusieurs ouvrages autour de ce thème. Il était l’invité du forum organisé par le groupe Michel sur le thème de la Souveraineté alimentaire, mi-octobre.

« L’agriculture est une histoire sans faim ! » : ainsi débutait Hervé Pillaud, spécialiste du numérique en agriculture, lors du forum organisé par le groupe Michel. « Les innovations ont toujours fait évoluer l’agriculture. Ici débute un monde durable : le premier enjeu sera de nourrir 10 milliards d’êtres humains demain, or la population est mal répartie sur la planète face à la disponibilité des terres agricoles. La Chine possède moins de terres que nous, aussi, elle part à la conquête de terres en Afrique… La raison d’être de l’agriculteur c’est de nourrir les autres. Le deuxième challenge consiste à réduire les impacts environnementaux, il va falloir travailler sur ce sujet. Les agricultures sont une partie du problème, mais elles sont aussi la solution. Enfin, le troisième challenge c’est de préparer l’avenir, car il est prometteur et choisir d’innover plutôt que de réglementer. Innover c’est l’avenir alors que réglementer c’est consolider une rente… Il faudra aussi repenser la question de la ressource (l’eau, l’énergie et la biodiversité) il est nécessaire de la concevoir comme un bien commun, un bien public. »
Face à l’avenir, Hervé Pillaud préconise de développer « un new deal qui se décompose en trois : les innovations numériques, les biotechnologies et les réformes structurelles ».
Selon lui, les avancées numériques vont révolutionner le conseil en agriculture : « Si les avancées sont encore timides, il est nécessaire d’utiliser ces innovations numériques pour aller plus vite dans la prise de décision. Cela peut également s’appliquer à la génétique au service du séquençage du génome, c’est une formidable opportunité. Ces nouvelles technologies appliquées à la formation vont nous simplifier la vie. Les certifications vont s’avérer plus efficaces, tout comme le système assurantiel. »

S’adapter au changement climatique

Au sujet des biotechnologies, « les OGM reviendront mais on aura perdu 30 ans… Les NBT (New Breed Technologies) vont permettre à l’agriculture de s’adapter au changement climatique. Car nous allons perdre la notion des saisons, il va nous falloir sélectionner rapidement des plantes adaptées à ce changement de climat. Un travail doit être lancé sur l’alimentation et la santé des plantes et la vie de nos sols. »
L’autre élément c’est le financement : « Il existe de nouveaux modèles de financement et de gestion d’entreprise, cela va se généraliser dans le domaine agricole. Des investisseurs extérieurs vont s’intéresser à l’agriculture, mais attention à ne pas perdre son autonomie ! »
Sur la formation et l’attractivité des métiers : « On va manquer de bras dans notre secteur, nous devons donner une image positive de l’agriculture, car nos détracteurs ont une forte puissance de nuisance et placer les établissements de formation agricole au cœur des innovations, donner aux étudiants les outils pour faire preuve d’innovations, utiliser le numérique et réinventer la formation continue via l’e-learning tant pour les agriculteurs que les enseignants. »

Une gestion durable des ressources : eau, biodiversité, énergie

« L’eau n’est pas plus rare qu’avant, mais on doit développer son stockage de manière pluriannuelle et optimiser son utilisation (qualité, gestion des effluents). Pour l’énergie, la gestion des déchets et les énergies renouvelables sont indispensables. Quant au carbone, il y a un marché et l’élevage est une opportunité. Sur le dossier de la biodiversité le champ des possibles est énorme, nous avons un véritable vivier, tout en protégeant les espèces menacées. Enfin, la santé des plantes, du sol, des animaux et des hommes est fondamentale. Avec le changement climatique, certaines espèces de microbes vont se réveiller, la santé globale est donc fondamentale et nous avons besoin de tous pour éduquer et impliquer les entreprises. Enfin l’alimentation est devenue un problème de santé publique, les écoles doivent réapprendre aux enfants à cultiver, cuisiner et consommer. Et les entreprises sont appelées à s’impliquer en prenant des participations dans les nouvelles start’ups de la French Tech. » Pour le renouvellement des générations : l’accès au foncier est primordial, les agriculteurs qui s’installent devront être accompagnés pour leur donner un revenu décent. Et déclarer d’intérêt général le vivant.

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