Vers une fin des truies bloquées en 2027 ?
Le Parlement européen a acté le 10 juin dernier sa volonté de mettre fin à l’élevage en cage d’ici 2027. Faisant abstraction des difficultés induites par ces nouvelles conduites, les élus ont souhaité prendre en considération la volonté des citoyens. C’est maintenant à la Commission européenne de formuler une nouvelle législation ainsi que les modalités de son application.
Le 10 juin dernier, les eurodéputés ont adopté massivement (à 558 voix pour, 37 voix contre, 85 abstentions) un texte évoquant la suppression de l’élevage en cage d’ici 2027. Ces débats ont fait suite à l’initiative citoyenne européenne «End the Cage Age» (Pour une nouvelle ère sans cage) qui a reçu 1,4 million de signatures provenant de tous les États membres de l’EU-28, dont 100 000 de la France. « Chaque année, plus de 300 millions d’animaux d’élevage sont élevés en cage pendant une partie ou la totalité de leur vie. […] Le bien-être des animaux élevés en cage suscite de graves préoccupations dans l’ensemble de l’Union, étant donné que ces animaux n’ont même pas la place de se tenir debout, de s’étirer ou de se retourner et qu’il est impossible pour les animaux en cage d’avoir un comportement naturel », explique le texte. Une étude menée par la commission des pétitions aurait par ailleurs constaté que les systèmes d’élevage sans cage sont faisables et déjà mis en place en Europe mais demandent des mesures financières.
Maîtriser les distorsions de concurrence
Le sujet n’a visiblement pas été pris à la légère et les incidences de cette volonté ont été énoncées une par une. La première réside dans l’augmentation du coût de production pour les agriculteurs. Les parlementaires ont considéré qu’« avant d’introduire toute modification dans les systèmes d’élevage, il convient d’évaluer les coûts de la transformation nécessaire, tant à court qu’à long terme ». La nécessité d’obtenir des aides financières et un retour sur investissement pour les éleveurs n’a pas été oublié mais aucune proposition n’a été décrite. De la même manière, le risque d’une distorsion de concurrence devrait, selon le texte, être maîtrisé par une vigilance accrue du respect de ces mêmes règles lors des importations. Qu’en sera-t-il en revanche de notre compétitivité à l’export ? Le danger d’une délocalisation de la production animale et donc de simplement déplacer la problématique vers les pays tiers semble ainsi bien plus prioritaire dans ce texte que le devenir des éleveurs.
Par ailleurs, les élus européens semblaient bien conscients que « le changement de système d’élevage augmentera, chez les animaux, le risque de propagation de maladies transmissibles et de stress social dû à la domination et à la compétition, ce qui a des répercussions sur leur santé et pourrait augmenter le besoin de médicaments ». Une analyse devra prendre en compte les besoins des secteurs selon les espèces animales. Les lapins, les filières avicoles et les porcins sont principalement dans le viseur. Néanmoins, du côté des truies, si on interprète aisément une volonté d’aller vers des cases de maternité liberté, le texte ne détaille pas si l’absence de contention pourrait également s’appliquer lors des inséminations ou juste après celles-ci.
Éduquer le consommateur
Le Parlement demande donc à la Commission européenne de proposer une révision de la directive 98/58/CE du Conseil afin de supprimer progressivement d’ici 2027 l’utilisation des cages dans les élevages de l’Union et « d’éliminer les contraintes bureaucratiques et réglementaires afin de permettre aux éleveurs d’apporter les changements structurels nécessaires […].» Selon cette même requête, les États membres devraient quant à eux « aider les agriculteurs et les éleveurs en leur fournissant des conseils et une formation, si nécessaire, afin de faciliter la transition vers des systèmes sans cage ». Du côté des agriculteurs, ils devraient avoir la lourde tâche d’éduquer les consommateurs et de leur communiquer les normes élevées actuellement en vigueur en matière de bien-être animal.
Par ailleurs, afin de renforcer la stratégie de durabilité « De la ferme à la table », la volonté de favoriser les circuits courts et de raccourcir les chaînes d’approvisionnement en s’appuyant sur des protéagineux produits localement a également trouvé sa place parmi les demandes des parlementaires.
Une nouvelle législation et les modalités de cette transition devraient donc être proposées dans les prochains mois par la Commission. Elles seront ensuite négociées entre le Parlement européen et le Conseil, représentant les États membres. Des discussions que nous suivrons évidemment avec intérêt.