Soja non OGM : le manque se fait sentir
Face à la pénurie de soja non OGM constatée sur les marchés mondiaux, les syndicats français de la nutrition animale réaffirment la nécessité de renforcer l’autonomie protéique de la France pour pérenniser certaines filières.
Dans une lettre adressée mi-avril aux interprofessions, La Coopération Agricole Nutrition Animale et le Syndicat national de l’industrie de la nutrition animale (Snia) s’inquiètent sur les tensions constatées depuis plusieurs semaines sur le marché des matières premières garanties non OGM (<0,9 %) et plus particulièrement sur le tourteau de soja. « La prime sur le tourteau de soja non OGM qui oscillait autour de 85 €/t fin 2020 et en début d’année a connu une augmentation significative depuis mars pour atteindre 183 €/t au 1er avril 2021 et vient de dépasser les 280 €/t d’après les opérateurs. Plus grave encore, depuis quelques jours, les cotations sont arrêtées par manque de disponibilité de matières premières », expliquent-ils. Aujourd’hui, les fabricants d’aliments doivent débourser 695 €/t pour du soja non OGM, contre 410 €/t pour du soja standard. Une situation qui touche l’ensemble des pays européens ayant fait le choix de développer des filières garanties sans OGM et qui compromet fortement la pérennité de ces dernières.
Deux causes liées à cette pénurie
Ces tensions sur les marchés mondiaux ont deux origines selon eux :
- Une demande très forte en soja standard, avec notamment certains acteurs comme les États-Unis et la Chine offrant des prix élevés aux principaux fournisseurs, le Brésil et l’Inde. Cela n’incite donc pas ces derniers à mettre en culture des variétés non OGM, qui offrent de moindres rendements. De plus, en Inde, des problèmes logistiques internes liés à la crise du Covid-19 compliquent l’export de matière première ;
- Un développement des filières non OGM en Europe ayant entraîné dans le même temps une hausse significative de la demande en soja non OGM.
« Les raisons évoquées envoient donc le signal d’un risque élevé, à court terme, d’une rupture totale des approvisionnements », avertissent les deux syndicats. Selon eux, celle-ci pourrait durer a minima jusqu’en novembre, sous réserve notamment des bons résultats de la prochaine récolte indienne. Et d’ajouter : « Au Brésil, la situation est plus tendue et dépendra de la capacité à inciter les producteurs à remettre en culture du soja non OGM ».
Une substitution compliquée
Il est donc nécessaire pour les fabricants d’aliments de trouver des matières premières de substitution, mais là encore l’exercice n’est pas évident. Outre la difficulté à remplacer le tourteau de soja sur le plan de la qualité protéique et le renchérissement du coût de l’aliment lié à sa substitution par d’autres matières premières, les deux syndicats s’inquiètent « de l’impossibilité technique de respecter certaines spécificités des cahiers des charges, notamment ceux demandant l’absence d’OGM ». Et d’ajouter : « Du côté des approvisionnements français, les réductions de surfaces en colza prévues sur cette campagne, inférieures de 11 % à la campagne précédente et présentant le plus bas niveau depuis 1997 viennent aggraver la situation en termes de disponibilité en matières riches en protéines non OGM. » Par ailleurs, le tourteau de tournesol HP est rare et cher au niveau mondial.
Ainsi, la nécessité de renforcer l’autonomie protéique de la France se confirme, via des alternatives végétales mais peut-être également animales, si la Commission européenne ré-autorise l’utilisation des protéines animales transformées comme elle le souhaiterait à partir du troisième trimestre 2021.